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La fourbure, une maladie souvent mal comprise et mal gérée

La fourbure est particulièrement redoutée par les propriétaires de chevaux, car elle fait partie des principales maladies mortelles chez les équidés et sa forme chronique peut elle aussi devenir un cauchemar. La fourbure n’est pourtant pas une fatalité et peut dans la majorité des cas se guérir, à condition toutefois d’en trouver les causes et de les traiter. Une approche qui demande du temps et de l’implication, mais qui est payante !  

© Christophe Bortels

Avec les coliques et certains accidents, la fourbure fait partie des principales urgences médicales chez les chevaux. On peut la résumer en quelques mots par une inflammation touchant le système d’attache du pied, soit la ligne blanche qui est la jonction entre la boîte cornée et P3 (os du pied). Et c’est notamment pour cela que la fourbure peut être si dangereuse – voire mortelle : « Si la maladie est mal ou pas du tout soignée, elle peut évoluer jusqu’à un désonglement du sabot, lequel permet à la troisième phalange du pied de s’incliner de plus en plus vers la sole et d’éventuellement la perforer », explique Bénédicte Mahieu, podologue équin qui accompagne de nombreux cas de fourbure au sein du centre spécialisé JM Equisuivis.

La fourbure peut entrainer une inclinaison de la troisième phalange et une perforation de la sole (Source : Clinique Vétérinaire des Verpillers)

La fourbure se manifeste souvent par une posture typique du cheval, qui se tient campé de devant et sous lui de derrière (antérieurs et postérieurs en avant de la verticale). Il reporte en fait son poids sur la partie postérieur des pieds afin de soulager la douleur que provoque l’appui de la troisième phalange sur la sole. Souvent, le cheval refuse également d’avancer et une fois lancé, il a du mal à s’arrêter car il est entraîné par le mouvement. Comme le précise Bénédicte Mahieu, « ces symptômes correspondent à la crise de fourbure, soit le moment où la ligne blanche se détache comme un scratch et créée une douleur intense chez le cheval. Avant cela, il existe une série de symptômes avant-coureurs, mais il ne sont pas toujours faciles à détecter. L’apparition d’une sensibilité au niveau des pieds peut par exemple être un des premiers signes de fourbure, tout comme un pouls plus fort ou une chaleur localisée au niveau de la couronne du sabot. Ces éléments peuvent évoluer en 24 à 72 heures et dégénérer vers une crise de fourbure.»

Plusieurs facteurs et un élément déclencheur

En général, un sabot (le plus faible) s’avère plus douloureux que les autres mais selon la podologue, il faut oublier l’idée qu’un cheval est fourbu d’un pied. L’inflammation du sabot n’est en fait que la partie émergée de la fourbure, laquelle est plutôt la résultante d’un enchainement et d’une accumulation de dérèglements chez le cheval. « Il n’y a jamais une seule cause à la maladie, mais toujours plusieurs facteurs et un élément déclencheur – celui qu’on voit généralement en premier », souligne Stéphanie Jasmin, co-fondatrice du centre de revalidation JM Equisuivis.

« Si l’on ne traite pas aussi les causes de la fourbure, il y a toutes les chances que la maladie devienne chronique et de plus en plus difficile à traiter »

Cet aspect clé de la fourbure est pourtant souvent méconnu ou sous-estimé, et c’est notamment ce qui peut expliquer les nombreux cas chroniques ou mortels. En général, les crises de fourbure sont prises en charge avec des traitements d’urgence à base d’anti-inflammatoires, de repos, de diète voire de solutions orthopédiques qui soutiennent la fourchette, et dès que le cheval va mieux il reprend sa vie et ses activités habituelles. « Cette approche soigne les symptômes mais si l’on ne traite pas aussi les causes de la fourbure, il y a toutes les chances que la maladie devienne chronique et de plus en plus difficile à traiter », précise Stéphanie Jasmin.

La fourbure peut se déclencher par exemple lors de la mise au pré, mais elle a toujours des causes sous-jacentes. (© Christophe Bortels)

Pour éviter les rechutes et aggravations, il est donc primordial de s’intéresser aux causes de la fourbure. Celles-ci varient évidemment d’un cheval à l’autre mais l’on distingue généralement plusieurs grandes catégories de facteurs qui peuvent se combiner et aboutir finalement à cette inflammation du système d’attache du pied qui est caractéristique de la fourbure :

L’embonpoint et les troubles hormonaux comme le SME favorisent grandement les fourbures (© Christophe Bortels)

Une approche pluridisciplinaire

Il peut sembler difficile de trouver les causes d’une fourbure étant donné le nombre important de possibilités, pourtant c’est un chemin nécessaire pour éviter les récidives. Un cheval qui a été fourbu aura besoin d’attention toute sa vie, mais n’est pas forcément condamné comme on le croit souvent. « Chez JM Equisuivis, on a sauvé une jument de 29 ans qui était vouée à l’euthanasie par son vétérinaire », raconte Bénédicte Mahieu, podologue et co-fondatrice de ce centre de revalidation. « Elle est arrivée chez nous complètement dénutrie, avec une fonte musculaire très importante, et elle restait tout le temps couchée. Quand on l’a vue on s’est demandé ce qu’on pourrait faire mais deux mois et demi plus tard elle était de retour chez elle en très bonne forme. »

Pour éviter que la fourbure se reproduise, il est nécessaire de s’intéresser d’abord aux conditions de vie du cheval, à son alimentation et à la santé de ses pieds.

Chez JM Equisuivis, les chevaux fourbus sont hébergés dans des boxes-paddocks adaptés qui leur permettent de bouger calmement, d’être en contact avec leurs voisins et d’être nourris de façon personnalisée. La méthode mise en place par le centre consiste en une approche pluridisciplinaire orientée autour des médecines alternatives comme le shiatsu, la phytothérapie, l’ostéopathie, l’hirudothérapie, la communication animale, etc, pour traiter les différents aspects et causes de la fourbure. « L’ostéopathie ou la massothérapie sont par exemple très utiles pour rétablir l’équilibre corporel après une crise de fourbure, car la position campée entraine de grosses compensations », illustre Stéphanie Jasmin, co-fondatrice de JM Equisuivis. « La communication animale ou la kinésiologie, quant à elles, permettent de traiter les aspects plus émotionnels de la maladie. »

Au centre de revalidation JM Equisuivis, les chevaux sont hébergés dans de grands boxes/paddocks qui permettent des mouvements doux. (© Christophe Bortels)

Placer son cheval dans un tel centre est évidemment plus facile puisque différents professionnels sont présents et communiquent entre eux, mais en tant que propriétaire il est tout à fait possible de mettre en place par soi-même un traitement pluridisciplinaire de la fourbure. « Chez nous, la base des soins repose sur la podologie, l’alimentation et le shiatsu, ensuite à mesure qu’on avance de nouvelles causes et nouveaux besoins de soin peuvent se dévoiler », explique Stéphanie Jasmin. Pour éviter que la fourbure se reproduise, il est en effet nécessaire de s’intéresser d’abord aux conditions de vie du cheval, à son alimentation et à la santé de ses pieds en se faisant accompagner par des professionnels. Sur base des constats effectués, on peut ensuite recourir à d’autres soins complémentaires (massages, hirudothérapie, shiatsu,…) et mettre en place des adaptations comme un déferrage ou un rééquilibrage des pieds, une meilleure gestion de la mise au pré, une suppression des céréales, un hébergement qui permet plus de mouvements,…

Tout cela risque de demander du temps, de l’implication et des efforts mais au final, prévenir la fourbure et ses récidives consiste en grande partie à offrir au cheval une vie saine et qui répond à ses besoins. Les bénéfices pour les propriétaires comme pour les équidés dépassent donc largement la prévention de la maladie !

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